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Ancien mannequin, Christine Hart a publié en 2012 un livre sévère sur l’univers de la mode et des top-models.
 
Un témoignage sur les pressions et les abus, y compris sexuels, que subissent de très jeunes femmes désireuses de réussir.
 
 
Il a fallu attendre vingt ans pour découvrir qu’à l’apogée de sa carrière, Linda Evangelista – le top-modèle qui ne sortait pas de son lit pour moins de 10 000 dollars – vivait en réalité dans une grande solitude. Son seul plaisir était sa Game Boy.
 
Pareillement, plusieurs années ont passé avant que Karen Mulder – « la blonde classe » – ne déclenche un scandale retentissant, peu avant d’être admise dans un service psychiatrique. Elle déclara qu’Albert de Monaco et d’autres dirigeants de l’agence Elite avaient essayé de la violer, que son père l’hypnotisait dans le même but et que son statut de mannequin faisait d’elle une monnaie d’échange sexuelle.
 
 
Paranoïa ou sinistre réalité ?
 
Depuis, la Hollandaise a présenté des excuses et fait profil bas suite [toutefois une plainte pour viol a bien été déposée en novembre 2001]. Karen Mulder est alors internée, mais sa tentative de suicide, en 2002, a relancé le débat sur le style de vie des mannequins et les répercussions psychologiques de leur travail. Dans ce monde, garder la tête froide et survivre aux succès comme aux échecs s’apparente à un véritable triomphe. Voilà ce que pense Christine Hart de sa profession. Pendant dix ans (des années 1990 et au début des années 2000), cet ex-mannequin a travaillé à Milan, Paris et New York. Elle a côtoyé les plus grands pendant l’âge d’or des top-modèles, travaillé pour le photographe Helmut Newton, défilé pour Kadhafi. Et elle a survécu pour raconter son histoire dans un livre.
 
Elle vient de publier en autoédition Lo que las modelos callan [traduction : « Ce que les mannequins ne disent pas »]. Une sorte de journal intime dans lequel cette Espagnole d’origine allemande dévoile ses expériences au sein d’une profession qui a fini par la considérer comme « un fossile », car elle a fait ses débuts à 25 ans, peu après avoir obtenu un diplôme de droit.
 
« Ma formation m’a indéniablement servi à mieux naviguer dans ces eaux infestées de piranhas et de requins », explique Christine Hart. Aujourd’hui mariée et mère de famille, elle raconte dans son livre de terribles histoires. Comme l’effondrement d’une camarade en plein casting en Grèce – apparemment, la jeune femme s’est évanouie en découvrant qu’il y avait à l’intérieur de son vagin, depuis vingt-quatre heure, « plusieurs préservatifs recouverts de sperme et d’un fluide », relate Christine Hart. « Ce qui est terrible, c’est qu’elle ne se souvenait pas des événements de la nuit précédente, si ce n’est qu’elle avait bu et fumé avec un photographe jusqu’à perdre toute notion de la réalité, écrit l’ancienne top-modèle. Il s’agit là d’épisodes isolés, mais ces quelques histoires sont déjà de trop car elles ne devraient pas impliquer des mineures. Commencer à 14 ou 15 ans est une aberration. A cet âge, les filles sont presque des enfants et il est facile d’être prise au piège par un mirage. »
 
 
Plaire au photographe, jusqu’au bout…
 
Si Christine Hart garde un bon souvenir de ses rencontres et de son travail avec des photographes réputés, comme le « génie » Helmut Newton (avec qui elle a réalisé une campagne pour Montblanc), elle n’a pas pour autant oublié l’arrogance d’autres appareils photo. « Les mannequins sont trop naïves et elles ont tendance à se sentir en position d’infériorité lorsqu’elles travaillent avec des photographes célèbres. Elles se croient obligées de leur plaire, elles rêvent de devenir leur muse, pour obtenir faveurs ou privilèges. En général, elles cèdent à leurs fantasmes, qui naissent souvent pendant les séances photo », déplore Christine Hart. L’ex-top-modèle a eu la chance de ne pas « être tributaire des modes » et d’avoir une image « classique » qui a facilité sa carrière à l’âge adulte, même si elle a toujours dû passer par « le contrôle qualité du mètre ruban ».
 
« Les mannequins souffrent plus de la dictature de la beauté aujourd’hui que dans les années 1980. D’une taille 38 imposée, on est passé au 34, en particulier sur les podiums, et les filles d’aujourd’hui ne transmettent aucune émotion. Elles n’arrivent pas à créer de lien avec le public. On ne sait plus si ces filles sont des robots ou des mannequins. La plupart n’ont que la peau sur les os et aucune d’elles ne sourit, ce qui n’arrange rien », estime-t-elle.
 
Elle-même a vécu des épisodes farfelus.
Comme défiler dans un bunker en plein cœur du désert libyen : « J’ai eu la peur de ma vie ! En théorie, on allait à Tripoli pour défiler à l’ambassade espagnole afin de promouvoir la mode occidentale. Mais en réalité nous avons atterri au milieu du désert et nous nous sommes retrouvées enfermées dans un bunker, devant le colonel Kadhafi en personne.” Christine Hart a subi l’addiction au travail à New York et, dans les soirées du festival de Cannes, a eu « l’impression d’être une potiche”.
 
Un jour, elle décide de quitter la profession. « Je suis tombée amoureuse et me suis mariée. Nous avons fondé une famille, je voulais me consacrer à mes enfants. J’avais 35 ans et je gagnais énormément d’argent », note-t-elle. Aujourd’hui, elle déplore que ce milieu soit passé du « club exclusif » des années 1980 à une profession populaire. « Les marchés et les frontières se sont ouverts. Des filles arrivent de partout, avides de succès et de célébrité à tout prix. Tout cela fait du métier un univers de rivalités. »
 
 
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Source de cet article : www.courrierinternational.com/article/2012/12/19/pas-top-la-vie-de-mannequin?page=all

 
 

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